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Taxe sur les services numériques : le Conseil constitutionnel est saisi

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Par une décision du 17 juin 2025, le Conseil d’État a décidé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionalité contestant la conformité de la taxe sur les services numériques aux principes d’égalité devant la loi et d’égalité devant les charges publiques1.


Cet article a été co-rédigé avec Nicolas Menard, Senior manager au sein d'EY Société d'Avocats.

La taxe sur certains services numériques (TSN), s’applique (i) aux services d’intermédiation digitale et (ii) aux services de publicité ciblée, lorsque le fournisseur fait partie d’un groupe ayant réalisé un chiffre d’affaires imposable mondial de plus de 750 millions d’euros, dont plus de 25 millions d’euros en France, au cours de l’année civile précédente2. Le lieu d’établissement du fournisseur n’a pas d’importance pour l’application de la taxe.

Dans l’affaire en litige, la société requérante a demandé le remboursement de la taxe payée au titre de l’année 2019 et, dans le cadre du contentieux devant le tribunal administratif de Montreuil, elle a soulevé une question prioritaire de constitutionalité. La société soutient notamment, en synthèse, que la TSN enfreint les principes d’égalité devant la loi fiscale et d’égalité devant les charges publiques compte tenu de la différence de traitement entre différents contribuables : (i) entre les contribuables français et étrangers, (ii) entre les contribuables selon qu’ils appartiennent ou non à un groupe consolidé pour lequel les seuils d’application de la TSN sont atteints, (iii) dans le cas où les deux entités d’un même groupe fournissent ou non de mêmes services imposables, (iv) dans le cas où le même service peut être fourni numériquement ou non, ou encore (v) entre les groupes dont le chiffre d’affaires se situe juste sous les seuils de taxation et les groupes dont le chiffre d’affaires se situe juste au-dessus.

S’écartant de l’avis rendu en 2019, dans le cadre de sa fonction consultative, sur le projet de loi sur Gouvernement portant création de la TSN qui n’avait pas identifié de manquement aux exigences constitutionnelles3, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, estime que la question soulevée présente un caractère sérieux et décide en conséquence de la renvoyer au Conseil constitutionnel afin qu’il se prononce sur la constitutionnalité de la taxe sous un délai de trois mois. Toute personne justifiant d’un « intérêt spécial », au sens de l’article 6 du règlement intérieur de la procédure QPC devant le Conseil constitutionnel peut soumettre des observations en intervention auprès du Conseil constitutionnel avant le 9 juillet 2025 à 16.00 (heure de Paris).

Le Conseil constitutionnel rendra sa décision dans un délai de 3 mois. Il ne devrait pas traiter de la conformité de cette taxe avec le droit de l’Union européenne.

Une éventuelle décision d’inconstitutionnalité pourrait permettre, sous certaines conditions, aux contribuables français et étrangers de récupérer des montants de TSN déjà acquittés. Dans cette perspective, afin de se prémunir de l’éventualité dans laquelle le Conseil constitutionnel déciderait de limiter les effets de sa décision aux seules instances en cours, les contribuables concernés pourraient avoir intérêt à procéder au dépôt d’une réclamation contentieuse auprès de l’administration fiscale avant que la décision ne soit rendue.

Ce qu'il faut retenir

Le Conseil constitutionnel est saisi d’une question prioritaire de constitutionalité interrogeant la conformité de la taxe sur certains services numériques au regard des principes constitutionnels d’égalité devant la loi fiscale et d’égalité devant les charges publiques. Il semble opportun, pour les contribuables concernés par cette taxe, de déposer dès que possible des réclamations sollicitant le remboursement de cette taxe. Par ailleurs, il est possible, sous conditions, de soumettre des observations en intervention auprès du Conseil, d’ici au 9 juillet.


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